Nouvelles de Koyo

Ah quel plaisir d'entendre la bonne joie dans la voix d'Alabouri ce soir au téléphone !

Cette joie n'est pas liée à l'évolution de la situation politique puisque de ce côté les choses ne font qu'empirer : à Bamako on se déchire pour le pouvoir, au Nord les rebelles Touareg et les Islamistes radicaux s'installent..

Non cette joie c'est celle d'un homme qui se sent responsable de la destinée de son village et qui a pu lui apporter 5,7 tonnes de mil il y a quelques jours, de quoi nourrir les habitants de Koyo pendant presque 3 mois.

Vous vous rappelez peut-être que jusqu'ici, les tentatives d'Alabouri et Hamidou pour retirer l'argent que nous avions viré sur le compte du village, s'étaient soldées par un échec. Mardi de la semaine dernière, nouvelle tentative d'Hamidou reparti à 300 km pour se présenter à la banque de Mopti. La cohue était t-elle ce jour là qu'il n'a pu pénétrer dans la banque. Ne se décourageant pas il dormit devant les portes et le lendemain matin il réussissait à retirer l'argent ! Restait à déjouer les nombreux voleurs qui s'en prenaient en particulier aux femmes, n'hésitant pas à arracher les sacs en pleine rue... Finalement le robuste Hamidou est arrivé sain et sauf à Boni avec les 2 millions de FCFA !

Alabouri a organisé l'achat du mil et hier, lors d'une grande réunion à Bonodama (grande esplanade rocheuse à proximité du village où nous donnions des consultations) chaque habitant de plus de 2 ans (c'est à dire capable de manger le tô, ce gâteau de mil base de l'alimentation), soit 411 personnes, se sont vu remettre 14 kgs de mil. Alabouri me dit, qu'en faisant 2 repas par jour, il peuvent tenir 3 mois. Je pense qu'ils font une moyenne avec les enfants et diminuent les rations car habituellement pour un adulte, il faut le double pour tenir 3 mois. Ils doivent également compter sur l'argent qu'ils peuvent gagner par leur travail dans la vallée. Et puis si la pluie arrive fin juin ils peuvent espérer avoir du maïs et des gombos vers la fin juillet et ainsi tenir jusqu'en octobre, moment des prochaines récoltes.

Alabouri a insisté plusieurs fois, au cours de notre longue conversation, pour que je transmette bien à tous ceux qui les aide (à vous donc), les profonds remerciements de "tout le village".

Dr Pierre Lamache

Camille Lamache